Dans une interview parue dans le quotidien El Pais à la veille du sommet de l’OTAN à Madrid (28-30 juin), le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albares, a longuement évoqué la crise de son pays avec l’Algérie.
Il a aussi parlé des menaces venant du « sud » et lancé des messages sibyllins concernant l’utilisation de la question migratoire et l’énergie comme armes.
« Le sommet sera marqué par l’agression illégale de la Russie contre l’Ukraine », et « les plus grandes menaces à la sécurité de l’OTAN, donc à la sécurité de l’Espagne et des Espagnols, viennent du flanc oriental », affirme d’abord Albares.
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Mais, poursuit-il, « il y a aussi des menaces du flanc sud que le reste des alliés reconnaissent ». D’ailleurs, informe-t-il, le dîner des ministres des Affaires étrangères du 29 juin sera centré sur le flanc sud et une des séances des chefs d’État et de gouvernement traitera de la situation dans le voisinage sud.
« La structure même du sommet le démontre. Et je suis sûr que le concept stratégique tiendra compte de ces menaces » et « ira encore plus loin », assure le chef de la diplomatie espagnole, soulignant que « de plus en plus, les menaces du sud sont des menaces russes du sud ».
Interrogé sur l’utilisation de l’immigration clandestine et l’approvisionnement en gaz comme armes, Albares a eu cette réponse : « S’ils veulent en faire une arme politique, ce qui est inacceptable, ils peuvent le faire. On l’a vu à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne, avec des émigrants venus du Moyen-Orient. On le voit avec le gaz russe pour faire pression sur les pays qui en dépendent. Aujourd’hui c’est une évidence. Mais il y en a d’autres, les cyberattaques, le terrorisme, la désinformation, le changement climatique. Ce sont des menaces hybrides ».
« L’Espagne n’a rien fait »
À propos de la crise avec l’Algérie, le ministre espagnol des Affaires étrangères est resté droit dans ses bottes concernant la position de son pays vis-à-vis de la question sahraouie, à l’origine de la brouille, continuant à soutenir que l’Espagne « n’a rien fait pour se retrouver dans cette situation » et que « chaque pays a le droit de prendre des décisions souveraines ».
Cela, tout en tendant la main pour de meilleures relations avec l’Algérie, « basées sur le respect mutuel, la souveraineté et la non-ingérence dans les affaires intérieures » et pour que « la diplomatie, le dialogue, l’amitié entre les deux peuples reprennent ».
Albares s’est aussi attardé sur les « blocages » qui touchent les transactions commerciales entre l’Algérie et l’Espagne.
« La politique commerciale est entièrement communautarisée, elle appartient à la Commission européenne, et c’est le vice-président exécutif et commissaire à la politique commerciale Dombrovskis qui analyse actuellement cette situation », dit-il.
« Chaque fois que nous détectons le blocage d’une opération, nous la transférons à la Commission, qui est celle qui vérifie la situation et dispose des instruments pour y répondre », explique-t-il, ajoutant que « l’Espagne n’a rien à demander » à l’UE étant donné que « la politique commerciale est commune, c’est la Commission qui agit ».
Aux hommes d’affaires espagnols qui se disent pénalisés par la situation, Albares promet de la « fermeté » dans leur défense, tout en restant discret quant à ce que va faire le gouvernement.
« J’étais en réunion avec le commissaire, nous avons fourni la certification de l’association bancaire et nous avons envoyé toutes ces opérations qui étaient bloquées à ce moment-là. Ce que j’espère, c’est que cette situation revienne dans les canaux de l’amitié entre les deux peuples, mais je veux aussi dire aux hommes d’affaires espagnols : nous serons fermes dans votre défense », promet Albares.
Interpellé pour réagir à un éditorial de l’Agence de presse officielle algérienne, très critique à son égard, Manuel Albares a répondu :
« Il ne s’agit pas de telle ou telle personne. Je représente la politique étrangère de l’Espagne et je travaillerai toujours pour l’amitié avec le peuple algérien, la main est tendue et nous voulons que la diplomatie soit récupérée. Mais de la fermeté de la défense de nos entreprises ».
Origen: Crise avec l’Algérie : l’Espagne cherche-t-elle à impliquer l’OTAN ?