Le quotidien français Le Monde décrit une atmosphère de « fin de règne » pour Mohammed VI

Le quotidien français Le Monde décrit une atmosphère de « fin de règne » pour Mohammed VI

Enquête« L’énigme Mohammed VI » (1/6). Vingt-six ans après son intronisation en 1999, le souverain marocain reste un personnage complexe dans son rapport au pouvoir. Alors que son état de santé soulève des interrogations, la perspective de sa succession attise luttes d’influence et coups bas entre factions de l’élite.

Le lundi 25 août 2025, le prestigieux quotidien français Le Monde a publié le premier chapitre de sa série spéciale « L’énigme Mohammed VI », consacré à la situation actuelle du monarque marocain après 26 ans de règne. L’article, signé par Christophe Ayad et Frédéric Bobin, évoque ce qu’il qualifie d’« atmosphère de fin de règne » au Maroc.

Selon Le Monde, les apparitions publiques du souverain véhiculent des images contradictoires qui nourrissent les doutes sur sa santé et sa capacité à gouverner. Le journal cite deux épisodes récents : le 7 juin à Tétouan, lors de la prière de l’Aïd al-Adha, où l’on a vu un roi « affaibli, assis sur un tabouret, incapable de se prosterner » ; puis, deux semaines plus tard, une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux le montrant « en maillot de bain, pilotant un jet-ski ». Pour Le Monde, « cette chorégraphie duale ne saurait mieux résumer le processus de transition que traverse le Maroc ».

L’article rappelle également qu’en octobre 2024, lors de la visite d’Emmanuel Macron à Rabat, le monarque était apparu visiblement fragilisé, renforçant la perception d’une vulnérabilité grandissante. Le quotidien souligne aussi « l’impression de vide » laissée par ses absences prolongées, souvent passées à l’étranger, y compris lors du violent séisme de septembre 2023.

Un autre volet de l’enquête concerne la sulfureuse proximité du roi avec la fratrie Azaitar, installée en Allemagne. Séduite par ce clan de combattants de MMA, Sa Majesté les a introduits dans son cercle rapproché à partir de 2018. D’après Le Monde, certains membres auraient obtenu un accès privilégié au monarque, filtrant jusqu’à ses interlocuteurs. Pour de nombreux observateurs, cette situation a provoqué une vive inquiétude dans l’establishment marocain, au point que des médias proches des services de renseignement, comme Hespress ou Barlamane, ont parlé d’un « péril Raspoutine ».

Face à ces inquiétudes, la monarchie a mis en place une communication « millimétrée », multipliant les mises en scène pour brouiller les pistes. Les missions de représentation à l’étranger sont réparties entre les membres de la famille royale, mais l’ascension du prince héritier Moulay El Hassan, âgé de 22 ans, est manifeste : il a reçu le président chinois Xi Jinping fin 2024 et a été promu colonel-major, étape traditionnelle annonçant une montée en puissance. Comme l’a confié un diplomate occidental cité par Le Monde, « il y a une mise en scène millimétrée, afin de ne pas envoyer de signaux susceptibles d’être interprétés comme un passage de témoin ».

La conclusion de l’enquête est claire : « la transition n’a pas commencé, même si elle est dans toutes les têtes ». L’état de santé fragile du roi, les intrigues autour de son entourage, la corruption endémique et une situation économique intenable pour la majorité des Marocains alimentent la perception d’une fin de règne imminente et d’une succession désormais engagée.

Depuis NO TE OLVIDES DEL SÁHARA OCCIDENTAL, nous soulignons que cette crise de succession et l’affaiblissement du monarque ne peuvent être dissociés de l’occupation illégale du Sahara Occidental. Alors que le makhzen s’efforce de masquer l’usure du pouvoir et de préparer la montée en scène de l’héritier, il poursuit une politique coloniale rejetée par le droit international et par le peuple sahraoui. La fragilité du régime met en lumière l’impasse de la stratégie marocaine visant à imposer un « plan d’autonomie » en lieu et place du référendum d’autodétermination promis depuis 1991. L’avenir du Sahara Occidental ne se décidera pas dans les coulisses du palais royal, mais dans l’application pleine et entière du droit international.

Ce premier chapitre de « L’énigme Mohammed VI » inaugure une série de six volets dans lesquels Le Monde examine les dilemmes d’un règne qui semble bel et bien s’approcher de son crépuscule.

Source : Le Monde, « Au Maroc, une atmosphère de fin de règne pour Mohammed VI », 25 août 2025