15 décembre 2025
Les Émirats arabes unis et les États-Unis avancent dans une nouvelle offensive économique au Sahara occidental occupé, avec la complicité directe du Maroc. Dans le sillage des repositionnements diplomatiques observés à Paris et à Washington, Abu Dhabi cherche désormais à sécuriser ses intérêts économiques sur ce territoire non autonome à travers des investissements présentés comme « verts » et stratégiques, transformant une occupation illégale en opportunité de profit et en fait accompli sur le terrain.
Les Émirats franchissent ainsi une nouvelle étape dans leur stratégie au Sahara occidental, en recherchant explicitement l’appui politique et financier des États-Unis afin de blinder leurs investissements dans un territoire en attente de décolonisation. Loin d’initiatives ponctuelles ou purement économiques, cette dynamique confirme une orientation de fond : internationaliser l’occupation marocaine par des alliances géopolitiques et financières de haut niveau.
Comme l’a révélé Africa Intelligence dans son article « Sahara occidental : les investisseurs émiratis dans le sillage des États-Unis », publié le 11 décembre 2025, Abu Dhabi se prépare à s’associer à la US International Development Finance Corporation (DFC) ainsi qu’à des entreprises américaines désireuses de s’implanter dans le territoire. L’objectif affiché est la création de joint-ventures sectorielles permettant de réduire les risques et de sécuriser les intérêts émiratis, après plusieurs revers essuyés dans la région, dont l’échec du groupe logistique DP World dans sa tentative de gestion du port de Dakhla.
Sécuriser des investissements dans un territoire occupé
Le cas du port de Dakhla-Atlantique est révélateur. À la suite de l’annonce, en mai 2025, d’un contrat record entre l’émiratie Taqa et la société marocaine Nareva, DP World avait manifesté son intérêt pour ce projet stratégique. Il a finalement été écarté par les autorités marocaines, soucieuses de conserver un contrôle direct sur cette infrastructure clé. Cet épisode semble avoir renforcé la conviction d’Abu Dhabi que toute implantation durable au Sahara occidental passe par un adossement clair à Washington.
Si les fonds souverains concernés n’ont pas encore été officiellement désignés, Africa Intelligence évoque ADQ et l’Abu Dhabi Investment Authority (ADIA) comme principaux candidats. Déjà très actifs au Maroc, ces deux acteurs cherchent à élargir leurs portefeuilles, notamment dans le secteur énergétique. Pour ADIA, présidée par Tahnoon bin Zayed Al Nahyan, frère du président émirati Mohamed bin Zayed, l’accent est mis sur des projets dits « verts », en parfaite cohérence avec une stratégie d’écoblanchiment déjà largement documentée.
Énergie « verte » et normalisation de l’occupation
Les discussions avec les autorités locales des territoires occupés sont désormais bien avancées. En particulier avec le Centre régional d’investissement (CRI) de Dakhla-Oued Edahab, dirigé par Ahmed Kathir, des négociations portent sur le déploiement de parcs éoliens pilotés par de grands groupes émiratis tels que Masdar, AMEA Power et Taqa. Présentés comme des projets de développement durable, ils sont mis en œuvre sans le consentement du peuple sahraoui et en violation du droit international.
Du côté américain, les entreprises n’ont pas encore annoncé de projets concrets, mais les discussions se poursuivent sur les formats et modèles des futures joint-ventures avec les Émirats. Cette dynamique est clairement soutenue par la diplomatie américaine : la récente visite d’une délégation officielle des États-Unis à Dakhla a préparé l’ouverture prochaine d’un consulat américain dans la ville, un geste politique lourd de conséquences.
À cela s’ajoute l’annonce antérieure de la DFC d’un soutien financier de 5 milliards de dollars destiné à faciliter l’implantation d’entreprises américaines sur place, consolidant une présence économique qui renforce de facto l’occupation marocaine.
L’investissement étranger comme outil politique
Ce nouvel axe Émirats–États-Unis, avec l’aval du Maroc et dans un contexte diplomatique où Paris n’est pas étranger, confirme que le Sahara occidental est devenu un laboratoire d’une stratégie bien rodée : utiliser l’investissement étranger, l’énergie « verte » et les grandes infrastructures comme instruments de normalisation d’une situation illégale.
Il ne s’agit pas seulement de rentabilité économique, mais de créer des faits accomplis destinés à rendre toujours plus difficile toute solution fondée sur le droit à l’autodétermination. L’implication directe de fonds souverains, d’agences publiques américaines et de grandes multinationales ne fait qu’aggraver cette dynamique.
Une fois de plus, le prétendu « développement » au Sahara occidental ne répond ni aux besoins ni à la volonté de sa population, mais à la logique d’alliances stratégiques qui transforment l’occupation en business.
Origen: Maroc • Sahara occidental : les investisseurs émiriens dans le sillage des États-Unis
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