En l’espace de quelques jours, le président Emanuel Macron a brisé deux trêves. La première est politique, et remonte à août 2022, lorsqu’il avait cosigné avec le président Abdelmadjid Tebboune une déclaration devant inscrire les relations entre les deux pays « dans une dynamique de progression irréversible ».
La seconde violation concerne l’Ekecheiria, cette trêve instituée durant la Grèce antique qui impose l’arrêt de toute hostilité durant les Jeux Olympiques.
En annonçant officiellement la décision de la France de définir le «plan d’autonomie » marocain comme seule base de règlement du conflit du Sahara occidental, le chef de l’Etat français participe activement à déstabiliser l’Afrique du Nord.
Le message qu’Emanuel Macron a transmis aux autorités algériennes puis au roi du Maroc est en réalité destiné directement au Front Polisario. Il dit clairement que la légalité internationale ne doit surtout pas s’appliquer au peuple sahraoui à disposer de ses droits inaliénables et imprescriptibles à l’autodétermination, à l’indépendance et à la liberté.
Tout comme Donald Trump en 2020, il ne lui laisse aucun autre choix que d’intensifier sa lutte armée pour la libération du Sahara occidental. Avec toutes les conséquences politique et sécuritaire que cela pourrait avoir sur une région qui va du Sahel à la Méditerranée.
La question est de savoir pourquoi le président français a décidé de donner une telle ampleur à la reconnaissance officielle de ce plan d’autonomie, sachant que cette option dite-marocaine avait été élaborée durant le mandat de son prédécesseur Nicolas Sarkozy ? La réponse il faut la chercher dans le contexte politique interne.
La victoire aux législatives du Nouveau front populaire impose au président de nommer un Premier ministre et un gouvernement de gauche. Ce nouvel exécutif est, entre autres, appelé à prendre les commandes de la diplomatie.
Pour les gouvernants français, il n’y a rien de pire que de gérer les relations avec l’Algérie lorsque ces dernières sont dans leur phase descendante. Avant même d’être nommé, ce gouvernement hérite déjà d’une bonne grosse crise avec Alger, concoctée par Macron et son gouvernement démissionnaire.
Cette reconnaissance officielle du fait accompli coloniale marocain au Sahara occidental est encore plus problématique pour La France Insoumise, parti de la gauche radicale et fer de lance du Nouveau Front Populaire. Si certains cadres de cette formation, à l’instar de Rima Hassan, ont soutenu publiquement le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui, Jean-Luc Mélenchon, le fondateur de LFI, affiche ouvertement son soutien au projet colonial marocain.
Né à Tanger, cet ancien responsable du Parti socialiste français n’a jamais caché sa proximité avec le makhzen. « J’ai lu des sottises sur mes positions et sur celles des Insoumis. Il n’existe aucune relation du mouvement Insoumis institutionnel avec qui que ce soit d’autre que les partis de la démocratie marocaine» avait-il dit le 5 octobre 2023, lors d’une tournée au Maroc, pour démentir les relations entre LFI et le Front Polisario.
Depuis jeudi 25 juillet, date de publication du communiqué de l’Algérie dénonçant la décision française, il n’y a eu aucune réaction de LFI. Sur les réseaux sociaux, Jean-Luc Mélenchon a consacré ses publications à la polémique sur la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques. L’engagement d’Emanuel Macron envers son ami Mohammed VI semble avoir pétrifié le camp Mélenchon.
En définitive, que va-t-il rester de cette décision de l’actuel président français ? Concrètement, rien pour les Sahraouis qui sont les premiers concernés. Ce peuple va continuer à lutter pour l’indépendance de son pays.
Le Front Polisario va intensifier la guerre qu’il mène contre une armée statique. Des soldats marocains dépressifs, obligés de se terrer dans le sable en espérant que les armes fournies par la France, les Etats-Unis et l’entité sioniste viendront à bout d’un adversaire déterminé.
Macron aura juste réussi à déclencher un nouveau cycle de crises avec Alger qui a décidé de retirer son ambassadeur à Paris.
Tarek Hafid
Origen: Sahara occidental : Macron met à mal le futur gouvernement de gauche