À Bruxelles, on semble décidé à trébucher deux fois sur la même pierre. À peine un an après que la Cour de justice de l’Union européenne a annulé l’accord de pêche avec le Maroc pour avoir été appliqué au Sahara Occidental sans le consentement du peuple sahraoui, la Commission européenne relance le dossier. Le commissaire européen à la Pêche, Costas Kadis, a confirmé cette semaine la volonté de rouvrir les négociations avec Rabat, au mépris des arrêts de la Cour et du droit international.
Ce geste, présenté comme un effort pour “réparer une relation stratégique” avec le Maroc, révèle surtout une dangereuse capitulation politique. Plutôt que de respecter la justice européenne, la Commission cherche encore une fois à contourner la loi pour continuer à exploiter les ressources d’un territoire qu’elle reconnaît elle-même comme “distinct et séparé” du Maroc. Or, la jurisprudence est sans ambiguïté : tout accord concernant le Sahara Occidental doit obtenir le consentement libre et préalable de son peuple, représenté par le Front Polisario.
Cette initiative intervient alors que Rabat intensifie sa pression diplomatique et renforce sa coopération avec la Russie dans le domaine halieutique. Le Maroc instrumentalise la pêche comme il le fait avec la migration ou la sécurité, transformant chaque dossier en monnaie d’échange politique. L’Union européenne, au lieu d’affirmer ses principes, se laisse enfermer dans une logique de dépendance et de chantage. Relancer un accord qui inclurait les eaux sahraouies reviendrait non seulement à bafouer le droit, mais aussi à légitimer une occupation illégale condamnée par les Nations unies.
Le Front Polisario a prévenu : tout nouvel accord couvrant les eaux du Sahara Occidental sans son approbation sera de nouveau attaqué devant la justice. “Ce n’est pas une question technique ni économique, mais une question de souveraineté”, a rappelé Oubi Bachir Bouchraya, représentant du Front Polisario pour l’Europe. En Espagne, plusieurs formations politiques demandent au gouvernement de conditionner tout soutien à un respect strict des arrêts européens. “On ne peut pas continuer à fermer les yeux. L’accord doit se conformer pleinement au droit international”, a souligné au Congrès le député de Sumar, Agustín Santos Maraver.
L’Europe se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins : céder à la logique du Makhzen ou rester fidèle à ses propres principes. En choisissant la première option, elle renonce à la justice pour un intérêt à court terme. Et ce renoncement ne trahira pas seulement le peuple sahraoui, mais aussi l’idée même d’une Europe fondée sur le droit.
Descubre más desde
Suscríbete y recibe las últimas entradas en tu correo electrónico.
