
Résumé d’un reportage publié dans Le Monde diplomatique (septembre 2025)
Le Sahel traverse une décennie marquée par des coups d’État, une crise sécuritaire persistante et la consolidation de régimes militaires. Selon un reportage de la chercheuse Nina Wilén, publié dans Le Monde diplomatique (septembre 2025), les espoirs placés dans les interventions étrangères se sont dissipés, tandis que les groupes djihadistes étendent leur emprise sur une région de plus en plus instable.
En juillet 2025, le Groupe des États du Sahel (Mali, Burkina Faso et Niger) s’est retiré de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), scellant ainsi son isolement politique et économique. Ce qui avait commencé comme des coups d’État « provisoires » s’est transformé, explique Wilén, en transitions indéfinies et en la consolidation de juntes militaires gouvernant avec un discours nationaliste et anti-occidental.
Le reportage rappelle que les interventions militaires étrangères, comme l’opération Barkhane menée par la France ou la présence de troupes de l’ONU et de l’Union européenne, n’ont pas réussi à freiner la violence. Bien au contraire : selon Wilén, « l’escalade mortelle » s’est accentuée. Entre 2016 et 2024, les attaques djihadistes se sont multipliées, entraînant le déplacement de millions de personnes au Burkina Faso, au Mali et au Niger.
Le Monde diplomatique publie des données révélatrices : plus de 3 000 attaques armées entre 2021 et 2024, concentrées dans la zone frontalière Mali–Burkina Faso–Niger. Les graphiques montrent une augmentation constante de la violence et l’incapacité des États à contenir Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), l’État islamique au Grand Sahara (EIGS) et d’autres groupes affiliés.
Les transitions politiques promises s’éternisent. Au Mali, la junte militaire a prolongé à plusieurs reprises le calendrier électoral ; au Burkina Faso, le capitaine Ibrahim Traoré gouverne avec un soutien populaire mais sans horizon clair de retour au pouvoir civil ; au Niger, le coup d’État de 2023 a consolidé un régime qui se présente comme alternative à l’échec des élites traditionnelles. Pour Wilén, ces juntes « se sont pérennisées, normalisant l’état d’exception ».
La sortie de la CEDEAO marque un tournant géopolitique. Les trois pays du Sahel cherchent désormais du soutien auprès de la Russie, de la Turquie et des pays du Golfe, au détriment de leurs anciens partenaires européens. « En marge des sanctions et de l’isolement, ils ont renforcé leur coopération militaire et économique avec de nouveaux acteurs », souligne le reportage. Ce réalignement illustre la perte d’influence de la France dans son ancien pré carré.
L’insécurité imprègne tous les aspects de la vie. Les déplacements massifs de population dépassent désormais les cinq millions de personnes, selon les chiffres cités par l’article. Parallèlement, les attaques contre des civils, des écoles et des marchés se multiplient. Wilén observe que l’échec n’est pas seulement militaire mais aussi politique : les juntes n’ont pas su garantir les services de base ni maintenir la cohésion sociale.
Un autre aspect mis en avant est la dimension économique de la crise. Le Sahel est devenu un espace où contrebande, narcotrafic et exploitation illégale des ressources naturelles financent les groupes armés. « La fragilité des États et la porosité des frontières créent un écosystème favorable à la criminalité transnationale », précise le texte.
Le reportage souligne également le rôle de la Turquie, qui profite du vide laissé par l’Occident pour accroître son influence à travers des accords militaires et commerciaux. Cette présence s’ajoute au soutien de mercenaires russes, tandis que les États-Unis et l’Union européenne tentent de redéfinir leurs stratégies. « Le Sahel devient un échiquier de rivalités internationales où les États locaux se réduisent à des pions », résume Wilén.
Le diagnostic dressé par Le Monde diplomatique est sans appel : la militarisation de la politique n’a pas enrayé la menace djihadiste, et la population civile reste la principale victime d’une guerre sans fin. Le Sahel vit ainsi dans « une insécurité permanente » qui menace de s’étendre vers le nord et le golfe de Guinée, mettant en péril la stabilité de tout le continent.
📌 Source : Nina Wilén, « Dans les pays du Sahel, les juntes en échec face aux djihadistes », Le Monde diplomatique, septembre 2025.
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