Plateforme “N’oubliez pas le Sahara Occidental”
Bir Lahlou / New York, 22 octobre 2025
Le Front POLISARIO élève le ton à un moment décisif. À quelques jours de la réunion du Conseil de sécurité des Nations unies, qui devra se prononcer le 31 octobre sur le renouvellement du mandat de la MINURSO, le président sahraoui Brahim Ghali a adressé une lettre ferme et documentée au Secrétaire général António Guterres.
Dans ce message, il dénonce la passivité de l’ONU face aux violations marocaines, l’impunité militaire et la manipulation politique du processus de paix.
Ce document, publié officiellement par la Sahara Press Service (SPS) et en lien direct avec le rapport S/2025/612, marque un tournant dans le discours sahraoui : le temps des ambiguïtés est terminé.
La vérité dérangeante : le Maroc a violé le cessez-le-feu et l’ONU l’a toléré
Dans sa lettre, Ghali rappelle que le conflit actuel « n’est pas une escalade spontanée », mais la conséquence directe de la violation matérielle du cessez-le-feu de 1991, commise par le Maroc le 13 novembre 2020 lors de son incursion à El Guerguerat. Depuis lors, les forces marocaines ont illégalement occupé de nouvelles zones, construit un mur de sable de 20 kilomètres et consolidé leur présence militaire dans la bande démilitarisée.
Le président sahraoui reproche à Guterres et au Conseil de sécurité de refuser de « nommer les choses », en s’abstenant d’attribuer clairement à Rabat la responsabilité de la rupture du cessez-le-feu. Cette omission, souligne-t-il, a permis à la puissance occupante d’agir dans une impunité totale depuis cinq ans, détruisant la crédibilité de l’ONU et transformant la MINURSO en une mission sans mission.
Crimes de guerre et silence institutionnel
La lettre va au-delà de la dénonciation politique : elle présente des preuves de l’utilisation systématique de drones par le Maroc pour cibler des civils sahraouis et des ressortissants de pays voisins traversant les zones libérées. Ces attaques, rappelle Ghali, constituent des crimes de guerre au sens du Statut de Rome et violent les principes essentiels du droit international humanitaire, tels que la distinction entre civils et combattants.
« L’ONU ne peut plus agir comme si la guerre n’existait pas », affirme le texte, exigeant une enquête indépendante sur les assassinats de civils et l’usage d’armes interdites.
Le Front POLISARIO dénonce également la nouvelle route Smara–Mauritanie, construite par l’armée marocaine, comme « un acte d’annexion et de provocation » destiné à consolider l’occupation et à modifier unilatéralement le statu quo territorial.
Blocage de l’information et complicité diplomatique
L’un des points les plus sévères de la lettre concerne les restrictions imposées à la MINURSO : le Maroc empêche les observateurs de l’ONU d’accéder à l’ouest du mur et oblige les véhicules de la mission à porter des plaques d’immatriculation marocaines, en violation du statut juridique de la mission.
Cette “domestication” de la MINURSO, selon les termes de Ghali, prive l’ONU d’informations fiables sur la situation réelle sur le terrain et réduit la mission à une simple présence symbolique.
L’absence prolongée du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), interdit d’accès au territoire depuis 2015, est également dénoncée.
Malgré les résolutions appelant à son retour, le Conseil de sécurité ne contraint toujours pas le Maroc à ouvrir le territoire aux missions d’observation.
Pendant ce temps, l’espace civique se rétrécit, les manifestations pacifiques sont réprimées et les défenseures sahraouies des droits humains subissent harcèlement et violences systématiques.
Un avertissement juridique au Conseil de sécurité
Ghali critique aussi l’usage, dans les rapports officiels de l’ONU, d’informations fournies par des institutions marocaines, telles que le Conseil national des droits de l’homme.
« Le Maroc est une puissance occupante », rappelle-t-il, et ses rapports « ne peuvent être considérés ni comme valides ni comme légitimes » dans un document onusien.
Citer ces sources, insiste-t-il, constitue une violation du statut international du Sahara occidental en tant que territoire non autonome soumis à un processus de décolonisation, conformément aux résolutions 34/37 (1979) et 35/19 (1980) de l’Assemblée générale.
Le dirigeant sahraoui met aussi en garde contre l’usage d’un langage diplomatique euphémisant qui dilue la responsabilité internationale.
L’ONU, affirme-t-il, ne peut pas se comporter comme une agence immobilière redistribuant des terres, mais comme une autorité garante du droit international.
Cinquante ans après l’invasion marocaine de 1975, le problème n’est pas la « durée du conflit », mais l’absence d’application des résolutions reconnaissant le droit du peuple sahraoui à choisir librement son avenir.
Autodétermination : la seule base légitime pour la paix
La lettre se conclut en réaffirmant l’engagement du Front POLISARIO en faveur d’une solution pacifique, juste et durable, fondée sur le respect du droit à l’autodétermination.
Ghali rappelle que les deux seules parties reconnues par l’ONU sont le Front POLISARIO et l’État occupant marocain, et qu’aucune « troisième voie » — ni l’initiative marocaine d’autonomie, ni les accords bilatéraux — ne saurait remplacer le référendum d’autodétermination.
Le président sahraoui annonce également que le Front POLISARIO est prêt à engager des négociations directes et sérieuses avec le Maroc, de bonne foi et sans conditions préalables, sous l’égide des Nations unies, sur la base de la proposition élargie présentée le 20 octobre 2025, actualisation de l’initiative sahraouie de 2007.
« Nous avons démontré par des actes notre engagement pour une paix juste et durable — conclut Ghali —, mais nous n’accepterons jamais une paix sans justice ni un silence imposé par l’occupation. »
Un message à la communauté internationale
La lettre du président sahraoui n’est pas une simple correspondance protocolaire : c’est un acte politique majeur.
À travers elle, le Front POLISARIO exige de l’ONU qu’elle mette fin à l’ambiguïté complice, qu’elle rétablisse la légalité internationale et qu’elle assume sa responsabilité historique envers le peuple sahraoui, qui résiste depuis un demi-siècle au colonialisme.
Le message est clair et pressant :
« Il est temps que les Nations unies assument leurs responsabilités envers le Sahara occidental et permettent à notre peuple d’exercer son droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance. »
Ce droit ne se prescrit pas.
Et tant que le Conseil de sécurité agira comme un médiateur d’intérêts plutôt que comme le gardien de la loi internationale, le conflit du Sahara occidental restera — comme le rappelle cette lettre — une plaie ouverte dans la conscience des Nations unies.
“Traduction : Plateforme N’oubliez pas le Sahara Occidental»
Lettre du Président de la République au Secrétaire général des Nations unies à l’horizon des consultations du Conseil de sécurité sur la MINURSO
Texte intégral de la lettre du Président de la République tel que reçu par l’Agence de presse sahraouie :
M. António Guterres
Secrétaire général des Nations unies
Nations unies, New York
Bir Lahlou, 22 octobre 2025
Monsieur le Secrétaire général,
Le Front populaire pour la libération de la Saguia el-Hamra et du Rio de Oro (Front POLISARIO) a pris connaissance de votre rapport (S/2025/612) sur la situation relative au Sahara occidental, daté du 30 septembre 2025 et diffusé comme document officiel le 21 octobre 2025, et souhaite faire connaître sa position concernant plusieurs éléments figurant dans ce rapport.
S’agissant de la « situation au Sahara occidental », le rapport indique que la situation actuelle « demeure marquée par des tensions et des hostilités de faible intensité entre le Maroc et le Front populaire pour la libération de la Saguia el-Hamra et du Rio de Oro (Front POLISARIO) » (S/2025/612, par. 2).
Le Front POLISARIO tient à rappeler et à réaffirmer une nouvelle fois que la cause fondamentale de cette situation, qui perdure depuis cinq ans, réside dans la violation matérielle et continue par la puissance occupante marocaine du cessez-le-feu de 1991 et des accords militaires y afférents, lorsque ses forces armées ont envahi ce qui était alors dénommé la « zone tampon » à Guerguerat, sur le territoire sahraoui libéré, et ont occupé illégalement d’autres parcelles du territoire, le 13 novembre 2020.
Il est incontestable — comme vous l’aviez signalé dans votre rapport (S/2021/843, par. 35) — que les forces d’occupation marocaines ont érigé « un nouveau mur de sable d’environ 20 kilomètres à Guerguerat » et « renforcé leur présence sur une superficie d’environ 40 km² dans la zone tampon ». L’État occupant marocain vous a en outre informé, de manière provocatrice, que ses actions à Guerguerat étaient « irréversibles » (S/2021/843, par. 23).
Il ne fait donc aucun doute que la puissance occupante marocaine a matériellement violé et torpillé, en toute impunité, le cessez-le-feu de 1991 et les accords militaires y afférents, provoquant « l’effondrement du cessez-le-feu », comme l’a reconnu le Conseil de sécurité dans sa résolution 2602 (2021) (préambule, par. 14), entre autres. Pourtant, et pour la cinquième année consécutive, le Secrétariat des Nations unies refuse de nommer les choses et de tenir la puissance occupante marocaine pleinement responsable des conséquences de sa violation matérielle du cessez-le-feu de 1991 et des accords militaires.
Le Front POLISARIO appelle les membres du Conseil de sécurité à garder ces faits à l’esprit lorsqu’ils se réuniront dans les prochains jours pour délibérer sur le renouvellement du mandat de la MINURSO.
Le rapport mentionne les deux arrêts rendus par la Cour de justice de l’Union européenne le 4 octobre 2024, qui ont conclu que les accords commerciaux relatifs à la pêche et aux produits agricoles conclus entre l’Union européenne et le Maroc l’avaient été en violation et méconnaissance du consentement du peuple sahraoui et de son droit à l’autodétermination et à la souveraineté permanente sur ses ressources naturelles.
Nous vous invitons, Monsieur le Secrétaire général, une fois encore, à user de tous les moyens à votre disposition pour informer l’opinion publique mondiale et les organes compétents de l’ONU de toutes les activités économiques et autres activités illégales menées par la puissance occupante marocaine au Sahara occidental occupé, visant à imposer par la force un fait accompli colonial dans le territoire et à saper l’exercice par le peuple sahraoui de son droit à la liberté, à l’autodétermination et à l’indépendance.
S’agissant de la situation sur le terrain, le rapport indique que la MINURSO a reçu des informations faisant état de frappes “menées par des drones” par les forces de la puissance occupante marocaine, ainsi que d’« incidents de tirs », de « frappes aériennes et autres » ayant causé des victimes civiles et des dégâts matériels (S/2025/612, par. 13, 14 et 19).
Comme nous l’avons déjà souligné dans nos précédents courriers, y compris notre dernière lettre (S/2025/533), depuis sa violation du cessez-le-feu le 13 novembre 2020, la puissance occupante marocaine continue d’employer tous types d’armes, y compris des drones, pour tuer non seulement des civils sahraouis, mais aussi des civils de pays voisins traversant les territoires sahraouis libérés.
Le Front POLISARIO réaffirme que le ciblage délibéré de civils et de biens de caractère civil constitue un crime de guerre au regard du Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Il s’agit également d’une violation du droit international humanitaire applicable aux conflits armés internationaux, y compris du principe de distinction, de l’interdiction des attaques indiscriminées et des actes de violence ou menaces de violence ayant pour but principal de répandre la terreur parmi la population civile. La puissance occupante marocaine doit être tenue pour responsable des crimes de guerre continus qu’elle commet au Sahara occidental.
Le rapport indique qu’« entre janvier et mars 2025, la MINURSO a observé que le Maroc avait achevé la construction d’une route d’environ 93 kilomètres, non encore officiellement ouverte, reliant la ville de Smara à la Mauritanie via le mur de sable. Cette route offrira un deuxième point de passage entre le territoire et la Mauritanie, en plus de Guerguerat. Lors d’une réunion avec le commandant de la Force de la MINURSO à Agadir le 19 février, le commandant de la zone sud de l’armée royale marocaine a déclaré que la route était destinée à un usage civil et n’avait aucun lien avec les opérations de l’armée » (S/2025/612, par. 23).
Le Front POLISARIO condamne fermement ladite « route » et souligne que cette mesure d’escalade et de provocation n’est qu’un épisode de plus dans la politique d’annexion et d’agression menée par la puissance occupante marocaine depuis son occupation militaire du Sahara occidental en octobre 1975. Elle rappelle directement la tentative de la puissance occupante, le 14 août 2016, de modifier unilatéralement le statu quo dans le territoire en ouvrant une brèche dans son mur militaire et en « aménageant une piste désertique » (S/2017/307, par. 2) à travers ce qui était alors la « zone tampon » à Guerguerat, en violation du cessez-le-feu et des accords militaires en vigueur à l’époque.
Comme aujourd’hui, les autorités de la puissance occupante avaient alors allégué que « ses travaux d’aménagement et de revêtement relevaient exclusivement du civil » (S/2017/307, par. 5). Comme l’ont montré les développements ultérieurs, l’absence d’une réaction rapide et ferme de la part de l’ONU — et du Conseil de sécurité en particulier — a encouragé la puissance occupante marocaine à poursuivre ses actions déstabilisatrices en toute impunité. Les conséquences du défi marocain au cours des quatre années suivantes sont connues de tous, comme indiqué plus haut.
Le Front POLISARIO met en garde contre les graves conséquences que pourrait entraîner ce nouvel acte d’escalade et de provocation, non seulement sur une situation déjà explosive en raison de la guerre d’agression marocaine, mais aussi sur la sécurité et la stabilité régionales. Le fait de qualifier la « route » rapportée de « civile » ou autrement ne change rien à sa nature d’instrument d’annexion employé par la puissance occupante, qui doit être fermement condamné. Les Nations unies doivent assumer leur responsabilité et mettre un terme aux actions déstabilisatrices de la puissance occupante et à sa « guerre d’usure » contre le processus de paix parrainé par l’ONU au Sahara occidental.
Le rapport indique que « l’incapacité de la MINURSO à accéder à des interlocuteurs locaux à l’ouest du mur de sable continue de limiter gravement sa capacité à recueillir des informations fiables sur la situation, à évaluer les développements dans l’ensemble de sa zone de responsabilité et à en rendre compte » (S/2025/612, par. 59). Il est donc impératif que le Conseil de sécurité, dans sa prochaine résolution sur le renouvellement du mandat de la MINURSO, exige que la mission bénéficie d’un accès plein et sans entrave à tous les interlocuteurs locaux du territoire.
Il est tout aussi nécessaire que le Conseil de sécurité garantisse que la puissance occupante marocaine lève les restrictions de longue date imposées à la MINURSO, notamment l’obligation pour la mission d’utiliser des plaques d’immatriculation marocaines pour ses véhicules à l’ouest du mur, en violation de l’accord sur le statut de la mission, et l’apposition de tampons sur les passeports du personnel de la mission au Sahara occidental (S/2025/612, par. 61).
Concernant les « droits de l’homme », le rapport rappelle que le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) n’a pas été autorisé à accéder au territoire depuis 2015, malgré des demandes répétées et alors même que le Conseil de sécurité, dans sa résolution 2756 (2024), a fortement exhorté à renforcer la coopération avec le HCDH, y compris en facilitant des visites dans la région (S/2025/612, par. 69).
Une fois encore, la puissance occupante marocaine n’est pas tenue pour responsable de faire obstacle au travail des organes de l’ONU et de leur refuser l’accès au territoire. Il est donc impératif que le Conseil de sécurité exige que le HCDH dispose d’un accès plein et sans entrave au Sahara occidental occupé.
Le rapport évoque également les informations reçues par le HCDH, au cours de la période considérée, concernant la contraction croissante de l’espace civique et les restrictions imposées aux droits des Sahraouis à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique, dans un contexte d’accroissement de la surveillance, du harcèlement et de l’intimidation ; il mentionne aussi la répression par les autorités de la puissance occupante marocaine des manifestations et rassemblements en faveur de l’autodétermination, avec un impact particulièrement notable sur les défenseures sahraouies des droits humains (S/2025/612, par. 70).
Les quelques cas cités dans le rapport ne reflètent pas l’ampleur des violations systématiques des droits humains commises par les autorités de la puissance occupante marocaine contre les civils sahraouis et les défenseurs des droits humains, en toute impunité et loin de tout contrôle international, du fait du blocus militaire et du black-out médiatique imposés au Sahara occidental occupé.
Le rapport mentionne également les « conditions de détention déplorables » des prisonniers sahraouis, et précise que les violations des droits humains à l’encontre des prisonniers de Gdeim Izik, détenus hors du Sahara occidental, continuent d’affecter gravement leur santé physique et psychique. Le fait d’incarcérer des Sahraouis à l’intérieur du Maroc les prive de visites familiales (S/2025/612, par. 72). Nous vous demandons une nouvelle fois d’assurer la libération immédiate et inconditionnelle de tous les prisonniers politiques sahraouis afin qu’ils puissent rentrer chez eux et retrouver leurs familles.
Le rapport indique qu’« le 2 juillet 2025, le Conseil national des droits de l’homme (CNDH) du Maroc a fourni des informations sur ses activités en matière de renforcement des capacités, de traitement des plaintes, de renvois, et de médiation au Sahara occidental » (S/2025/612, par. 75).
Le Maroc est une puissance occupante au Sahara occidental conformément aux résolutions de l’Assemblée générale 34/37 (21 novembre 1979) et 35/19 (11 novembre 1980), entre autres. Les informations fournies par des instances marocaines ou par des diplomates marocains sur le Sahara occidental sont irrecevables et ne peuvent être citées dans un rapport du Secrétaire général sur cette question. Non seulement ces informations manquent de toute crédibilité, mais elles portent atteinte au statut international du territoire en tant que territoire non autonome engagé dans un processus de décolonisation, sur lequel la puissance occupante n’exerce aucune souveraineté.
Dans ses « observations et recommandations », vous indiquez que le cinquantième anniversaire du conflit, en novembre 2025, met en lumière la persistance de cette situation préoccupante, mais appelle également à un renouveau des efforts en vue d’une solution rapide à ce conflit de longue durée (S/2025/612, par. 80). Ce qui sera commémoré en novembre de cette année, c’est le cinquantième anniversaire de la “Marche noire” du Maroc, condamnée par le Conseil de sécurité dans sa résolution 380 (1975) du 6 novembre 1975, qui a demandé au Maroc de retirer immédiatement « tous les participants à la marche » du Sahara occidental (dispositif, par. 2 et 3).
Le Front POLISARIO rappelle que la cause immédiate qui a embrasé le conflit au Sahara occidental fut « l’invasion annoncée » par le Maroc, à laquelle l’Espagne a fait référence dans sa lettre (S/11851) adressée au Président du Conseil de sécurité le 18 octobre 1975, soulignant que cette situation menaçait la paix et la sécurité internationales et visait à ignorer le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination. L’invasion effective a eu lieu le 31 octobre 1975, lorsque les forces armées marocaines se sont infiltrées et ont envahi la partie nord du Sahara occidental.
Vous exhortez de nouveau « toutes les parties concernées à s’engager sans délai à soutenir les efforts des Nations unies pour remettre le processus sur la bonne voie vers une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable, garantissant l’autodétermination du peuple du Sahara occidental conformément aux résolutions 2440 (2018), 2468 (2019), 2494 (2019), 2548 (2020), 2602 (2021), 2654 (2022), 2703 (2023) et 2756 (2024) du Conseil de sécurité (S/2025/612, par. 81).
Le Front POLISARIO rappelle une fois encore que les deux parties au conflit au Sahara occidental sont le Front POLISARIO et la puissance occupante marocaine, et réaffirme sa disposition à coopérer avec vous et avec votre Envoyé personnel afin de parvenir à une solution pacifique, juste et durable pour parachever la décolonisation du Sahara occidental.
Comme nous l’avons indiqué dans nos lettres (S/2021/980, S/2022/797, S/2023/794 et S/2024/774, entre autres), les lignes directrices établies par le Conseil de sécurité quant à la nature de la solution au conflit du Sahara occidental — pour laquelle la MINURSO a été créée en 1991 par la résolution 690 (1991) — ne se limitent pas aux résolutions du Conseil précitées. De plus, le Conseil de sécurité est l’organe qui a créé, sous son autorité, la MINURSO et son mandat, et n’a cessé depuis de rappeler et réaffirmer toutes ses résolutions antérieures sur le Sahara occidental, y compris sa dernière résolution 2756 (2024).
Le Front POLISARIO réaffirme qu’il n’est pas possible de marginaliser les résolutions de l’Assemblée générale relatives au Sahara occidental en tant que question de décolonisation inscrite à l’ordre du jour des Nations unies depuis 1963, celles-ci continuant à constituer le cadre d’une solution pacifique, juste et durable.
Le Front POLISARIO soutient fermement votre observation selon laquelle une surveillance indépendante, impartiale, globale et régulière de la situation des droits de l’homme est nécessaire pour assurer la protection de toutes les personnes au Sahara occidental (S/2025/612, par. 87). À cet égard, le Front POLISARIO appelle à activer la responsabilité juridique et morale des Nations unies envers le peuple sahraoui, en particulier les civils sahraouis vivant dans les zones sous occupation marocaine illégale.
Vous soulignez que la présence de la MINURSO depuis environ trente-quatre ans témoigne de la volonté des Nations unies et de la communauté internationale d’aboutir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable au conflit du Sahara occidental, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité (S/2025/612, par. 89). Comme nous l’avons déjà affirmé, nous continuons d’appeler à une mission robuste et pleinement dotée, non seulement pour mettre en œuvre son mandat, mais aussi pour fonctionner comme une opération de paix moderne surveillant, protégeant et rapportant sur les droits humains dans sa zone de responsabilité, entre autres. Au vu de la détérioration de la situation des droits humains au Sahara occidental occupé, il est moralement et politiquement inacceptable que la MINURSO fasse figure d’exception, alors que la promotion et la protection des droits humains sont devenues une priorité dans toutes les opérations de paix de l’ONU.
Comme nous l’avons rappelé dans notre dernière lettre (S/2025/533), plus de soixante ans se sont écoulés depuis que l’Assemblée générale a inscrit le Sahara occidental sur la liste des territoires à décoloniser. Depuis lors, l’Assemblée générale et ses organes subsidiaires traitent la question au titre du Chapitre XI de la Charte des Nations unies, reconnaissant le statut international du Sahara occidental comme question de décolonisation et le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’indépendance, afin de vivre librement sur sa terre, conformément à la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale.
Le mois d’octobre de cette année marque le cinquantième anniversaire de l’invasion militaire du Sahara occidental par la puissance occupante marocaine, le 31 octobre 1975, en violation flagrante de la Charte des Nations unies et du droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’indépendance. Cinquante ans durant lesquels la puissance occupante a mené une politique d’expansion et d’annexion par la force, et une guerre d’extermination contre le peuple sahraoui, avec pour objectif unique d’anéantir notre peuple, occuper sa terre, confisquer ses ressources naturelles et saper ses droits légitimes reconnus au niveau international.
Il est temps que les Nations unies assument leurs responsabilités à l’égard du Sahara occidental, et qu’elles permettent à notre peuple d’exercer librement et démocratiquement son droit inaliénable à l’autodétermination et à l’indépendance.
Le Front POLISARIO a démontré à maintes reprises, par des actes concrets, son engagement sincère en faveur d’une paix juste et durable. Tout en demeurant attaché à la pleine mise en œuvre du mandat pour lequel le Conseil de sécurité a créé la MINURSO, il reste disposé à travailler avec les Nations unies et l’Union africaine afin d’aboutir à une solution pacifique, juste et durable pour achever la décolonisation du Sahara occidental, sur la base du respect plein et entier de la volonté du peuple sahraoui et de son droit inaliénable, imprescriptible et non négociable à l’autodétermination et à l’indépendance.
À cet égard, le Front POLISARIO réitère sa disposition à engager des négociations directes et sérieuses avec le Maroc, de bonne foi et sans conditions préalables, sous l’égide des Nations unies, sur la base de l’esprit et du contenu de la proposition élargie présentée au Secrétaire général le 20 octobre 2025, en vue de parvenir à une solution pacifique, juste et durable pour achever la décolonisation du Sahara occidental, conformément aux résolutions pertinentes des Nations unies et de l’Union africaine, ainsi qu’aux principes du droit international.
Je vous saurais gré de bien vouloir informer les membres du Conseil de sécurité de la présente lettre.
Veuillez agréer, Monsieur le Secrétaire général, l’expression de ma haute considération.
Brahim Ghali
Président de la République arabe sahraouie démocratique
Secrétaire général du Front POLISARIO. (SPS)